Le dossier de l’expulsion des immigrés mine encore davantage les relations entre l’Algérie et Paris

Par le délégué à la presse, Hajj Mohamed Bendamia   en France

 

Un rapport parlementaire français place l’Algérie parmi le cercle des pays les plus problématiques en ce qui concerne la question de  l’expulsion des immigrés  sommés de quitter le territoire français, une question qui revient à chaque fois dans le cadre du débat politique et diplomatique entre les deux pays. Les citoyens des pays du Maghreb représentent la majorité des migrants irréguliers contre lesquels de telles décisions sont prises.

Selon le rapport publié par la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française, les autorités du pays sont confrontées à de grands défis dans la mise en œuvre des décisions de « départ obligatoire » pour les immigrés qui ne disposent pas de documents légaux prouvant leur identité ou leur nationalité. Les dernières statistiques sur lesquelles s’appuie le rapport indiquent que l’année 2023 a vu le prononcé de 47.535 décisions obligeant le départ d’étrangers en France, dont 34,5% (soit environ 16.500) concernent des citoyens des pays du Maghreb. Il a été constaté que 96 % de ces décisions n’ont pas été mises en œuvre en raison de la non-présentation des documents consulaires nécessaires à l’expulsion de ces personnes. Selon les données, la plupart des cas de refus de délivrance de ces documents provenaient des autorités consulaires des pays du Maghreb, notamment de l’Algérie.

Le rapport souligne que parmi les raisons générales qui conduisent à la non-exécution des décisions d’expulsion figurent la présence de problèmes techniques et administratifs, comme l’envoi de dossiers incomplets par les autorités françaises aux consulats, ou le fait que les dossiers ne répondent pas aux normes requises. Les consulats peuvent également parfois ne pas être en mesure de traiter certaines demandes en raison d’un manque de clarté sur la partie responsable ou d’erreurs dans l’identification du consulat approprié, ce qui perturbe le processus d’octroi des documents nécessaires. L’autre raison principale du refus de délivrance de documents consulaires est la difficulté de déterminer l’identité nationale des immigrants. De nombreuses personnes sommées de partir ne disposent pas de pièces d’identité officielles, ce qui oblige les autorités françaises et les consulats compétents à déterminer leur identité sur la base de critères imprécis comme la langue, les connaissances culturelles, ou encore les déclarations de la personne concernée. Ce processus n’est pas toujours précis, notamment pour les migrants originaires des zones frontalières entre les pays du Maghreb.

Le rapport s’étend pour donner à l’Algérie ses propres raisons, pour expliquer les problèmes liés à la faiblesse des expulsions. A cet égard, il affirme que la raison la plus importante contribuant au retard de ce processus est l’autorité chargée des affaires d’immigration en Algérie. Si c’est le ministère français de l’Intérieur qui supervise les procédures liées à l’immigration en France, la situation en Algérie est complètement différente, puisque la responsabilité incombe au ministère algérien des Affaires étrangères et non au ministère de l’Intérieur. Le rapport affirme que le ministère algérien des Affaires étrangères utilise le dossier de l’immigration comme outil de pression politique dans les relations bilatérales entre l’Algérie et la France.

L’autre raison, selon le rapport, serait due à l’organisation du service consulaire algérien en France. L’Algérie compte 19 consulats dans toute la France, mais il existe une différence notable dans l’efficacité de ces consulats dans la délivrance des documents consulaires requis. Dans certains consulats, le taux de délivrance des documents consulaires ne dépasse pas 5 % des cas, tandis que dans d’autres il peut atteindre 20 %.

La répartition géographique de l’activité des consulats algériens en France ne correspond pas au découpage administratif français, puisque plusieurs consulats algériens sont situés sous la tutelle d’une même région administrative française, ce qui crée des difficultés dans la coordination des procédures entre les autorités françaises et algériennes.

Ces dernières années, la question de la délivrance des titres de transit consulaire a été source de vives tensions entre l’Algérie et la France. Les médias français ont mesuré, à chaque fois, le niveau des relations avec ce dossier, qui parfois s’est atténué et est revenu à la crise à d’autres moments. L’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait déjà accusé, il y a 3 ans, les autorités algériennes de ne pas coopérer à la réception de son dossier. citoyens expulsés de France. Mais le président algérien Abdelmadjid Tebboune a répondu sur un ton sarcastique au ministre français, le qualifiant de « Moussa », faisant référence à ses origines algériennes, niant totalement que son pays refuse de recevoir ses citoyens. Il a souligné que le nombre de candidatures reçues par les autorités algériennes ne dépasse pas une vingtaine, alors que le ministre français a évoqué un nombre considérable de candidatures rejetées.

Ce rapport parlementaire intervient dans un contexte de crise diplomatique majeure entre les deux pays, en raison de  la position de la France  qui soutient le plan marocain d’autonomie au Sahara occidental, au moment où l’Algérie soutient l’autodétermination dans cette région conformément aux décisions des Nations Unies. Depuis juillet dernier, l’Algérie a retiré son ambassadeur de France et réduit sa représentation diplomatique à son niveau le plus bas.

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